Le greenwashing : qu’est-ce que c’est, comment ça marche ?

L’autre jour j’étais au cinéma*, et avant le film on a eu droit à une magnifique pub pour une voiture, roulant à vive allure à travers des décors naturels somptueux. Aucun bruit de moteur, juste l’image de la voiture filant à travers champs.
A la fin, le message s’affiche, toujours sans aucun bruit de moteur : « Jusqu’à 20% d’émissions en moins »**.

*J’ai vu Dunkerque, c’était pas mal mais trop de libertés historiques à mon goût, genre y’avait aucun Français dans les rues de la ville pendant que les Anglais évacuaient, mon oeil, on me la fait pas à moi, je me souviens parfaitement de mes cours d’histoire avec Mme David au lycée***.
**Le pourcentage est peut-être faux, je ne m’en souviens plus, j’ai oublié, pardon Internet.
***Non c’est faux, j’avais oublié ce passage de mes cours, désolée Mme David, si vous lisez ces lignes vous étiez une super prof, juste j’ai pas de mémoire.

J’ai ricané à la fin de la pub, en disant à mon copain « et beh, c’est le cliché du greenwashing cette pub ».
Parce que cette pub essayait de me faire croire que cette belle voiture-visiblement-sans-moteur-vu-qu’on-l’a-jamais-entendu- est un produit safe pour l’environnement.

« Origine 100 % naturelle », « actif végétal », « la nature est une force » … C’est alléchant, c’est beau, tant d’écologie dans la publicité, j’en aurais presque la larme à l’oeil, snif.

Sauf que ces termes s’apparentent un peu trop souvent à du greenwashing. Dommage !

Si vous n’avez jamais entendu parler du greenwashing (ou écoblanchiment en français, parce qu’il faut qu’on francise tout dans la vie, cette fin de semaine je vais acheter de la gomme à mâcher et du maïs éclaté), c’est bien dommage car c’est un sujet important qu’il est utile de reconnaître quand on cherche à améliorer sa consommation.

Laissez-moi donc vous conter le merveilleux principe de ce merveilleux concept (non).
En mode « Père Castor, raconte-nous une histoire » mélangé au film 99F. Parce que l’indécence n’a pas de limite.

Temps de lecture : 14 minutes


  • 1- C’est quoi, le greenwashing ?

Pour faire très simple, le greenwashing consiste, pour une entreprise nocive sur le plan environnemental par exemple, à se donner une image écolo.

Si on creuse un petit peu, on peut définir le greenwashing de manière plus précise comme une technique ou un ensemble de procédés de communication, marketing ou relations publiques utilisés par une organisation qui veut se donner une image responsable.

Tout cela implique évidemment que cette image n’est qu’une image, que l’entreprise ou l’organisme n’a en réalité pas de comportement responsable, et que l’entreprise dépense davantage d’argent pour faire campagne que pour financer des actions réelles.
L’annonce n’a ainsi qu’un effet gadget, commercial (éventuellement accompagnée d’un embryon de politique durable, à but tout aussi gadget, juste histoire de dire « regardez c’est pas du greenwashing, on a un type qui s’occupe du développement durable dans notre entreprise !« ).

C’est comme si je m’achetais cinquante t-shirt avec écrit en gros dessus « J’AIME LES CHATONS » alors qu’en fait j’aime pas du tout les chatons, et qu’en plus je maltraite des chatons.

kittenMoi en pleine maltraitance de chaton. 

Actuellement, la prise de conscience et la sensibilisation sur des thèmes comme l’écologie, l’éthique, le social … grandit dans la population. On parle beaucoup plus d’écologie maintenant, par exemple, qu’il y a quelques années.

Du coup, le patron de l’entreprise (appelons-le Pierre-Hubert) se dit que dis donc, ça ferait un super axe de communication ça, l’écologieéthiquesocialresponsable.
Pierre-Hubert sait bien que son entreprise pollue beaucoup / a un impact néfaste sur la nature ou sur les gens (ou sur les deux soyons fous) / maltraite des chatons (MONSTRE !). Mais il ne peut pas le dire, ça ferait mauvais genre.

Donc il va continuer à faire la promo de ses produits et services, mais en leur donnant une tonalité qui ne jurerait pas avec l’ambiance du moment. L’écologie comme argument de vente. 
Au milieu d’un rallye PETA, il va troquer son t-shirt « JE MALTRAITE DES CHATONS » par un t-shirt « J’AI RIEN CONTRE LES CHATONS ». Tout en continuant à maltraiter des chatons parce que c’est ça, son business.

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« Attends, c’est à la mode là, leurs trucs de bobo-écolo, les huiles essentielles, le bicarbonate et le savon de Marseille, nan ? ». Pierre-Hubert a flairé le filon, il en profite pour utiliser ces arguments, même si ses produits ne contiennent que des traces infimes de bicarbonate ou de savon de Marseille.

En utilisant une imagerie et des arguments qui collent avec les préoccupations des consommateurs, l’entreprise essaie de continuer à vendre tout en donnant bonne conscience au consommateur, qui aurait sinon hésité à acheter le produit ou le service.

Le greenwashing peut donc également être utilisé pour créer des arguments de vente factices (« ce produit est naturel » alors que pas du tout, par exemple) ou simplement pour suggérer une image responsable.
L’argument peut aussi être mis en avant, comme s’il était complètement fifou, alors qu’on serait en droit de le considérer comme prérequis.

IMG_9317Oh non, des fruits 100% d’origine naturelle 😦 Moi qui adore les pommes en polystyrène 😥   Ici, on voit que l’argument « 100% origine naturelle » est mis très en avant, alors qu’on parle quand même de compote, et que donc on serait en droit de s’attendre à ce que les fruits aient bien poussé sur un arbre … 


  • À quoi s’applique le greenwashing ?

Quand on parle de greenwashing, on pense en premier lieu à l’effet sur le plan écologique, environnemental. C’est normal, le terme vient à la base de là.

Mais on se rend compte que le même concept peut être appliqué à des entreprises se donnant une image éthique, ou socialement responsable par exemple. J’ai des exemples en tête, on en reparle plus bas.

Donc le greenwashing va pouvoir être utilisé sur tous les plans, pour donner à l’entreprise une image responsable, quel que soit ce domaine de responsabilité (environnement, éthique, social, emploi …)

Une entreprise qui va se vanter de créer des emplois -alors qu’elle traite très mal ses employés.
Une entreprise qui va se vanter d’améliorer le pouvoir d’achat -alors que derrière elle piétine l’éthique.

Je dis « entreprise », mais le greenwashing n’est pas l’apanage du secteur marchand de biens consommables (sinon ce serait trop facile).

Sont concernés les produits consommables : alimentation, produits d’hygiène ou d’entretien, cosmétiques, matières premières (pétrole, énergie), papeterie, sacoches en macramé …
Mais aussi des produits plus durables : voitures, électroménager, électronique, équipement informatique, meubles de chez le Suédois …

De manière souvent moins perceptible mais tout aussi réelle, le greenwashing peut aussi être utilisé pour des services : banques et assurances en premier lieu, et bien d’autres (services d’entretien, transports, tourisme …).

Les entreprises du secteur marchand sont donc susceptibles de faire du greenwashing. Mais ce ne sont pas les seules (sinon ce serait pas drôle non plus) !

On peut tout à fait trouver des exemples de greenwashing pratiqué par des collectivités locales, des entreprises publiques, des politiques

ILS SONT PARTOUT !

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Bon, on va surtout parler de greenwashing écolo, mais bref c’était aussi pour dire que le procédé est utilisé pour d’autres domaines !

Mais que fait la police, me direz-vous ? (ou pas, mais c’est juste pour la transition)
L’autorité de régulation professionnelle de la publicité a essayé, en 2009, de cadrer les choses, mais elle n’a sorti que des « recommandations » développement durable, autrement dit des lignes directrices ni contraignantes, ni même vraiment incitatives (pas de pénalités en cas de greenwashing, tant que les arguments commerciaux ne contreviennent pas directement à la loi).

Autant vous dire que la réglementation ne décourage pas franchement nos publicitaires.

*** Aparté publicité mensongère ***

La nuance avec la publicité mensongère est ténue, et la minuscule faille juridique est largement exploitée par les publicitaires amenés à faire du greenwashing.

Je ne suis absolument pas juriste. Cependant, la publicité et le marketing sont des professions réglementées : on ne peut pas faire ou dire n’importe quoi. Mais comme dans toute activité réglementée, il suffit de sortir très légèrement des lignes tracées pour que le flou juridique s’installe.

Selon l’article L121-1 du code de la consommation, la publicité mensongère est avérée si la pratique commerciale repose sur certains éléments. Ce qui se dessine, c’est que le code de la consommation encadre à peu près strictement ce qui est affirmé, quantifié par l’annonceur (l’entreprise).

En revanche, les formulations floues, les suggestions … ne sont pas mentionnées explicitement dans la loi. Ce qui laisse le champ libre au publicitaire un peu adroit (ou armé de bons juristes, ou les deux).

*** C’était : l’apparté publicité mensongère ***

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  • Le greenwashing, comment ça marche ?

Comme tout procédé de communication/marketing, le greenwashing illustre une parfaite maîtrise du langage et des codes de la communication.

Je ne vous apprends rien si je vous dis que la com et le marketing, c’est l’art de choisir les mots, les symboles et les couleurs qui vont bien pour former un message véhiculant ce qu’on veut dire ou vendre.

Exemple : je veux vous vendre une purée de salsifis.
Je peux dire « ACHETEZ MES SALSIFIS », mais y’a des chances pour que vous me disiez « lol non merci, arrête de crier« .

shhhHEHO ça va hein on n’est pas dans une bibliothèque, j’ai le droit de crier « SALSIFIS » !

Par contre, je peux vous donner envie d’acheter la purée en présentant différents arguments, que je vais accentuer ou non en fonction des préoccupations du moment chez les consommateurs.
On va dire qu’en ce moment, les consommateurs ont l’air d’être attirés par le naturel, le bio, etc.
Je peux dire que mes salsifis ont poussé et qu’ils sont récoltés dans les règles de l’art, que la purée est préparée selon une recette traditionnelle.

Vous ne pouvez vérifier aucune de ces informations, et j’ai le droit de les utiliser puisque je n’avance aucune certitude (« les règles de l’art » et « recette traditionnelle » ne sont pas des arguments réglementés, juste des mots). Si ça se trouve les salsifis ont poussé sous serre et gazés d’engrais, et la recette est bourrée d’additifs.

Donc en choisissant mes mots, je peux orienter le message dans un sens ou dans l’autre.
Le greenwashing pousse à l’extrême cette logique.

Il permet à l’entreprise de s’affubler d’un masque responsable, tout en ne contrevenant pas directement à la loi.
Par exemple, une marque qui dit « mon produit est d’origine végétale » alors qu’il est néfaste (pour le consommateur comme pour l’environnement), c’est du greenwashing : l’argument n’est pas illégal puisque « origine végétale » (ou même « 100 % naturel ») ça ne veut pas dire grand-chose. L’amanite tue-mouche c’est végétal, ça veut pas dire que j’en veux dans mon yaourt. Le plomb c’est naturel, mais c’est moyen bon pour la santé.
Mais l’entreprise se sert de cet argument pour faire vendre son produit.

Il s’agit donc d’une forme de désinformation, où le consommateur est inondé de messages positifs par des entreprises à impact négatif en réalité.
Le but du message : donner bonne conscience au consommateur, lui donner l’impression qu’il consomme mieux et de manière responsable, alors qu’en fait pas du tout, et lui faire choisir CE produit.

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Les techniques utilisées sont très variées, plus ou moins évidentes et plus ou moins insidieuses.

Elles peuvent agir sur tous les aspects qui composent un produit, une marque, une enseigne, c’est-à-dire : son nom, son slogan, son logo, son identité visuelle ou graphique, ses éléments de langage, son imaginaire, son environnement photographique/artistique

L’ADEME en a listé certaines dans son guide anti-greenwashing. En italiques, je vous mets des exemples !

  • le mensonge pur et simple (ex : notre produit est biodégradable, alors qu’il ne l’est pas)
  • les promesses exagérées (ex : vous réduirez vos émissions de CO2 de 70%, alors qu’en fait ce n’est que 2%)
  • l’usage de termes abscons (ex : « crème aux bioenzymes Y76 et aux extraits naturels naturels de paluvier »)
  • le manque de transparence (ex : étude scientifique bidon menée sur 4 personnes et demi)
  • la suggestivité disproportionnée des visuels par rapport au produit ou au service réel (ex : une marque de voiture qui n’utilise que des visuels à tendance green)
  • de faux écolabels autoproclamés (également appelé autolabellisation, ex : le label Envirocert*)
  • une mise en avant hors contexte du produit (ex : regardez comme cette voiture consomme peu -en roulant à 10km/h pendant 4 secondes)
  • des allégations sans fondement (ex : chiffres ou statistiques bidons)
  • une fausse exclusivité (ex : notre produit est le seul à être biodégradable dans sa catégorie, achetez-le -même si en fait c’est faux)

*Envirocert est un label fantaisiste inventé de toutes pièces par mes soins à l’instant même. Comme quoi, un nom qui fait sérieux ne veut rien dire !

À cette liste, je rajoute de mon côté les éléments suivants :

  • une création, un changement ou une modification du nom du produit, dans le but lui donner une sonorité et un imaginaire plus écolo-bio-responsable.
  • une création ou un changement de logo, pour lui donner des couleurs ou formes culturellement associées au développement durable.
  • un packaging trompeur
  • l’adoption d’une identité visuelle associée inconsciemment aux valeurs environnementales / éthiques / sociales.
  • la promotion d’une image de marque faussée (c’est à toi que je parle, mon cher Yves Caillou)
  • l’utilisation de messages faussement positifs par des entreprises à impact global (très) négatif.
  • l’utilisation d’arguments présentés comme exceptionnels alors qu’ils sont basiques (le « fruits d’origine 100% naturelle » qu’on a vu au-dessus)
  • le jonglage avec le langage et les approximations pour tromper le consommateur : un wording abusif, peu clair, des phrases un peu alambiquées …
  • l’instrumentalisation de la science, avec des études très parcellaires, voire bidon, des chiffres fantaisistes inventés ou exagérés …
  • la mise en avant d’une information unique, censée être la caution verte ou responsable du produit. Information souvent sortie de son contexte (genre les shampooings sans silicones mais avec une composition toujours aussi nulle)

Notez bien que le greenwashing peut utiliser des arguments affichés : « produit d’origine naturelle », « préserve l’environnement », « défendre votre pouvoir d’achat » …
Mais aussi des techniques et des codes plus discrets, qui s’adressent davantage à l’inconscient.

Je veux dire par là, l’utilisation d’un champ lexical donné (mots liés au naturel, par exemple), de tournures de phrases travaillées pour donner l’impression que le produit est bon pour l’environnement / éthique / pour l’égalité sociale.

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« Parfum avec des extraits naturels », « Fraîcheur naturelle » … Flagrant recours au champ lexical du … naturel, pour ce produit qui n’a rien de naturel, en fait. 

Ou, de manière encore plus insidieuse, le greenwashing s’empare aussi de l’identité visuelle ou de l’outil graphique en adoptant des symboles, des images ou des couleurs qu’on associe instinctivement à la nature (pour le greenwashing purement environnemental, par exemple).
Ces couleurs peuvent être le vert (of course), le bleu, le blanc, le jaune également, etc.
Par contre une entreprise qui veut se faire passer pour écolo n’utilisera pas du violet pétant (couleur peu présente d’elle-même dans la nature, comparé au vert de l’herbe ou au bleu du ciel et de la mer).

Ainsi, même sans utiliser de mots, l’entreprise peut amorcer un changement dans la perception de son produit par les consommateurs pour mieux correspondre aux valeurs des consommateurs, sans pour autant changer quoi que ce soit au produit lui-même ni au message explicite porté par des mots.


  • Quelques exemples concrets

Je vous propose quelques exemples concrets (avec ou sans les noms), pour bien situer le schmilblik et voir que c’est un procédé très courant, qu’il soit assumé ou non.
À lire aussi, le rapport 2017 « Publicité et environnement » de l’Ademe et de l’ARPP, avec de nombreux exemples de publicités dont certaines relèvent du greenwashing.

► une grande enseigne de fast food qui passe d’un fond rouge à un fond vert.
=> le vert, couleur nature par excellence ! Par la même occasion, on fait disparaître le nom pour ne laisser que le logo, tiens, ni vu ni connu …
Le même fast food affiche d’immenses images de salade fraîche dans ses locaux : le message incident essaie d’introduire l’idée de produits frais, sains …

mcdo.pngI see what you did there, Ronald.

*****

► une compagnie pétrolière qui choisit comme logo rappelant une fleur (ou un soleil ?) verte et jaune.
=> le symbole de la fleur/du soleil (nature) et les couleurs également naturelles (vert, jaune). Ce qui n’a rien à voir avec l’activité de l’entreprise (elle-même très polluante).

bpParce que les fleurs ça pousse dans le diesel, c’est bien connu (it is known)

*****

► des cosmétiques bien cracra qui adoptent un nom et un packaging rappelant le naturel.
=> Par exemple « Nectar of Nature » de chez Carrouf (nom qui renvoie hyper directement au naturel, packagings épurés avec des fleufleurs et des couleurs simples …). Pour la packaging, y’a notre Yves national aussi.

nectarofnaturePackaging épuré, nom évocateur, fleufleurs … La totale. Sachez que certains produits sont labellisés Cosmébio, sans pour autant être de super produits, à lire ici.

*****

► un slogan ou une devise trompeuse, floue ou induisant en erreur. Genre « La nature est une force », ou encore le « créateur de la cosmétique végétale«  (ouais vous voyez de qui je veux parler) qui a fondé toute sa com sur l’image nature/clean/petites fleurs et plantes vertes alors que la composition n’est vraiment pas satisfaisante du tout.

poudreDéjà, la poudre de Baïkal, ça pourrait bien être une plante issue d’un Harry Potter, j’en saurais rien. Et puis « extraite via un processus 100% naturel », ça nous éclaire pas beaucoup, tout comme « issue d’une filière végétale » (encore heureux que la plante soit issue d’une filière végétale, ça m’aurait inquiétée qu’on la fasse pousser sur un rat-taupe glabre).

*****

► un produit bien chimique qui adopte un arbre comme logo ou visuel.
=> les arbres c’est bien, qui n’aime pas les arbres ? Achète mon produit, il est cool pour les arbres, j’aime les arbres, la preuve ya un arbre sur la bouteille.

ajax.pngPower Ranger Vert, transformatioooon !

*****

► une compagnie nucléaire, d’énergie ou pétrolière qui joue sur les images « nature » (forêt, champs …)
=> en même temps, on n’allait pas nous montrer des déchets radioactifs. Mais bon, faire un parallèle entre la prairie en fleurs et le réacteur nucléaire, fallait oser.

pub-recrutement-edf.jpgL’indécence n’a pas de limites, chez EDF non plus.

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un supermarché qui se targue de protéger le pouvoir d’achat des Français.
=> alors que d’une part, son but est bien de vendre (faut arrêter de se faire passer pour Robin des Bois), et d’autre part les prix extrêmement bas sont permis par des politiques d’achat très agressives pour les producteurs (grosso modo, l’éthique est partie aux égouts) qui perdent eux-mêmes en pouvoir d’achat !

leclerc_mai68_02En plus en reprenant un visuel très marqué « Mai 68 » : l’enseigne utilise un élément de la culture sociale pour faire valoir son argument très exagéré.

*****

► un patron d’un géant agro-alimentaire qui tient un discours à haute valeur éthique et sociale.
=> j’aimerais tellement croire que tout cela soit sincère … J’essaie de mettre ça en parallèle avec l’affaire, l’année précédente, du marketing abusif de Danone en Indonésie pour pousser les mères à passer au lait en poudre … dans un pays où l’eau potable est rare.

*****

► un cosmétique « aux actifs 100% naturels » (interdiction de dire « bio » si pas labellisé) alors que la composition est nocive
=> un actif naturel, ça ne veut rien dire, ça n’a pas de valeur scientifique probante.
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*****

► une banque qui se vante de son bon niveau de RSE (responsabilité sociale de l’entreprise) tout en finançant des projets ni éthiques, ni sociaux, ni écolos.
=> Les livrets LDD des banques qui, en parallèle, financent des projets hautement polluants et dénués de toute éthique.

*****

► une chaîne de prêt-à-porter qui se vante d’éthique en récupérant vos vieux vêtements, tout en produisant l’intégralité de sa collection dans des conditions atroces.
=> Oké elle récupère mes vieilles culottes, mais le gosse qui fabrique mon t-shirt au fin fond du Bangladesh s’en tamponne un peu la margoulette de ma vieille culotte qu’H&M recycle, tant que je continuerai à cautionner ces conditions de fabrication.

hmDu vert, du blanc, du feuillage, un slogan bien politiquement correct (« pour une mode plus durable »)

*****

► un faux label responsable, comme Intermarché et son label « pêche responsable » (qui n’est pas un « vrai label »)
=> le label a été inventé par l’enseigne (donc il est forcément adapté à ses critères), et de plus il est bien trop semblable au label MSC (qui juge une pêche « durable »). Ce faux label a d’ailleurs été épinglé par le Jury de déontologie publicitaire en 2012.

*****

► la multitude de shampooings qui s’affichent maintenant « sans silicones et sans paraben » à grands renforts d’images de champs de blé.
=> comme si la simple absence de ces deux éléments suffisait à faire du produit un shampooing clean. Notons par ailleurs que beaucoup de ces shampooing contenaient des silicones et des parabens, avant que la thématique n’arrive sur le devant de la scène, forçant les fabricants à agir concrètement.

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*****

► une lessive qui se targue de se lancer dans plus d’écologie en mode « trève de blabla » alors que la composition est toujours aussi nocive.
=> la totale : couleur verte, effet « pur », argumentaire proactif, « origine végétale », « biodégradable » (on n’a pas la preuve de tout ça !), logos qui peuvent être source de confusion pour le consommateur non averti (qui peut les prendre pour des labels)
Voir ici l’analyse de l’Observatoire indépendant de la publicité.

lechat-pubExemple d’un argumentaire à tendance culpabilisatrice, logos confusionnants, nom évocateur (« éco »), packaging suggérant la nature (vert, blanc, bleu).

*****

► la même lessive, qui lance sa lessive « au savon d’Alep », avec couleur verte et imitation de papier kraft pour le côté écolo … J’ai d’ailleurs noté que sur le petit flacon, point de label à l’horizon, par contre sur le grand flacon, un label européen Ecocert est visible … Mystère !

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*****

► un nettoyant cuisine qui se dit « biodégradable » (derrière on nous dit que c’est « selon la règlementation en vigueur »), « à base de puissants actifs d’origine naturelle » (sic), avec des termes flous (« technologie powergreen« ) … Et une composition pas mirobolante, aucun label ni résultats pour prouver les arguments avancés.

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*****

► un petit pot pour bébé avec un nom bien évocateur, un joli ciel bleu en packaging, et cette mention hallucinante : « Ingrédients 100% d’origine naturelle », comme si c’était exceptionnel et complètement fou de manger des choses d’origine naturelle uniquement …

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*****

► un fournisseur d’énergie qui se vante de proposer de l’électricité « verte », alors qu’il fonctionne par rachat de certificats d’origine et ne produit (et donc n’investit) pas ou très peu dans les énergies renouvelables.
=> Les offres « vertes » d’EDF, Lampiris …


  • Comment se prémunir du greenwashing ?

– Savoir le reconnaître

Déjà, savoir que ça existe est important.
Au-delà de ça, connaître un peu mieux les mécanismes du greenwashing permet de les repérer plus facilement, un peu comme quand un magicien dévoile ses trucs : après, tu les vois plus facilement lors du tour de magie.

magicReconnaître le greenwashing : vue d’artiste. 

Plus on s’intéresse à cette thématique, plus on remarque aisément les approximations et autres mentions vagues destinées à « faire croire que » ou à « donner l’impression que ».

On remarque aussi plus facilement l’utilisation complètement à côté de la plaque de certaines imageries, couleurs, visuels … par des produits ou services pas du tout concernés par l’écologie.

Donc apprendre à lire derrière les lignes, à voir de l’autre côté du miroir, c’est très utile. Ça permet de rester vigilant.

**********

– Rester vigilant et critique

La vigilance, c’est donc le deuxième bouclier. Garder son esprit critique, en toutes circonstances.
C’est d’ailleurs assez frappant, parfois, de voir des gens remettre très fortement en doute la pertinence du bio ou des labels écolos, et à côté de ça prendre pour argent comptant ce que la publicité leur dit sur d’autres sujets.

Rester critique vis-à-vis des arguments « responsables » permet d’éviter pas mal de pièges : évidemment, on ne devrait pas croire sur parole des gens dont l’objectif est de nous faire acheter un maximum.
Dit comme ça, ça semble logique. Mais ça ne l’est pourtant pas pour beaucoup de gens qui achètent « parce qu’ils disent sur le flacon que c’est à base d’ingrédients naturels ».
Un produit ou un service n’est pas composé par un joli message et un beau packaging.

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– S’informer

Évidemment, le meilleur moyen de déjouer le greenwashing, c’est de se renseigner et de s’informer.
Aucun achat n’est à ce point urgent pour qu’on n’ait pas le temps de prendre quelques minutes pour vérifier une composition, une origine … Internet regorge de sites spécialisés ou d’avis de consommateurs, ce serait dommage de s’en priver.
Par exemple pour les cosmétiques : La vérité sur les cosmétiques
Pour les banques : financeresponsable.org
Il existe aussi des applications (comme Noteo) qui vous permettent de scanner le code-barre d’un produit et de découvrir sa note sur le plan environnemental, éthique, social.

Lire la composition d’un produit devrait être le premier réflexe quand on achète quelque chose.
A titre perso, si je ne comprends pas du tout la composition (longue, avec des noms chelous), je me méfie. Si l’étiquette vante une crème « aux extraits d’huile d’argan » et que l’argan arrive en 15e position des ingrédients derrière des laureth sulfates ou des silicones ou que sais-je, je me méfie.

suspiciousMoi quand je lis une composition trop longue pour être honnête. 

Les marques pratiquant le greenwashing comptent sur notre flemme ou sur notre manque de vigilance pour faire fonctionner ces arguments creux. Malheureusement c’est donc à nous que revient la charge de s’informer !

On peut également rester informé sur la question du greenwashing, via des organismes ou ONG qui veillent au grain (ADEME, Observatoire indépendant de la publicité, associations environnementales …).

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– Vérifier les labels et certifications

Un autre moyen est de se fier aux labels et certifications officiels.
ATTENTION, tous les labels ne se valent pas ! Il en existe des très stricts, d’autres très laxistes.

Nature et Progrès est connu pour être assez strict ; à l’inverse, le label bio européen est assez mou du genou.
Il existe même des labels inventés, comme on en a vu un exemple plus haut : des labels créés de toutes pièces par le fabricant qui du coup, peut s’auto-labelliser, pratique pour faire semblant !


Voilà donc quelques pistes sur le greenwashing, ses procédés, ses effets.

Évidemment je ne suis pas spécialiste du sujet, et j’ai moi-même un gros travail à faire en termes de déconstruction.

Mais le fait est qu’il est de plus en plus facile de repérer les manifestations de greenwashing, ne serait-ce que quand on prend l’habitude de lire les étiquettes ou de se renseigner sur une marque ou une entreprise …

TOUTES les entreprises ou marques n’ont pas recours au greenwashing, évidemment (et heureusement).
J’ai peut-être une lecture un peu technique ou rigide des choses : n’hésitez pas à me dire en commentaire s’il y a des choses pas claires ou qui vous semblent exagérées !

Si vous avez d’autres exemples ou d’autres signes de greenwashing que j’aurais omis, ou si vous avez des corrections à apporter sur cet article, n’hésitez pas !

14 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Catherine dit :

    Article tres interessant. Ce qui est note sur les packaging m’a toujours fait rire les genre « sale a la main » ou « enfourne a la main » ta pizza que tout le reste du processus a ete fait par des machines mais tu sais qu’a la fin, elle sera forcement meilleure qu’une autre parce que quelqu’un s’est brule les doigts. Bref ce genre la quoi et c’est ce que tu decris parfaitement. Je trouve ca difficile effectivement parce que quand on « debute » en dechiffrant les ingredients c’est pas evident. Surtout que dans le magazine des consommateurs ( info ou intox?) ils te disent que certains produits sont pas top mais bien rinces, ca va et que celui la est mieux qu’un autre qui est carrement perturbateur endocrinien mais aussi que la au moins maintenant, on a identifie et isole l’ingredient qui peut etre juge nocif si mal rince. Je ne sais pas si je suis claire, tout ca pour dire que perso il me faut plus de tes lumieres ( que je lis deja dans tes autres articles) pour dechiffrer le schmilblik. Tu veux pas te mettre dans un coin de mon caddie a mon prochain shopping?

    J’aime

    1. Wildwildwaste dit :

      Haha je sais pas si je rentre dans un caddie ^^

      Pour contourner les problèmes, comme je suis flemmarde (la flemme de vérifier chaque composant), j’essaie d’acheter le plus brut possible.

      Par exemple, je veux acheter du gel d’aloe vera. Si ya plus de 4 ingrédients, c’est suspect, puisque c’est censé être un produit brut.

      Idem pour du miel, ou une huile. Si ya d’autres ingrédients que le miel ou l’huile, c’est suspect.

      Les noms tordus aussi. Je préfère des biscuits où c’est juste écrit « beurre, farine, sucre » plutôt que « matière grasse végétale hydrogénée, sirop de glucose, farine, E889, E654, conservateurs »

      Aimé par 2 personnes

      1. Catherine dit :

        C’est vrai, c’est un bon debut pour acheter en toute connaissance de cause. Merci 😉

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  2. Lacarriere dit :

    Superbe article !
    Très clair.
    Tu as mis en image un produit bio «Nectar of Nature», le présentant comme du greenwashing.
    Il y a la mention bio. C est normal ?

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    1. Wildwildwaste dit :

      Très bonne remarque 🙂 Je n’ai pas choisi le visuel idéal (je vais peut-être le changer).
      Je me suis basée sur cet article de « La vérité sur les cosmétiques » : http://blog.laveritesurlescosmetiques.com/nectar-of-nature-rien-greenwashing/

      En effet, même labellisé Cosmébio, un produit peut contenir des éléments nocifs, des huiles de synthèse, etc.

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    2. Wildwildwaste dit :

      Je cite un passage intéressant sur la crème labellisée :
      « 10% du total des ingrédients sont issus de l’agriculture biologique. Avec cette configuration, la crème correspond au strict minimum pour qu’elle puisse être certifiée par le cahier des charges Ecocert. L’aloe vera et l’huile d’argan sont les seuls composants bio. Etant donné que l’huile d’argan est présente en toute petite quantité, l’aloe vera représente la plus grande partie des composants bio.
      Par contre, on ne connaît pas la qualité de l’aloe vera, ni le taux aqueux du composant »

      (toujours sur La vérité sur les cosmétiques : http://blog.laveritesurlescosmetiques.com/nectar-of-nature-rien-greenwashing/ )

      Ici, le label est sans doute mérité (conformité au cahier des charges) mais il est respecté a minima -uniquement 10% des ingrédients issus de l’agriculture bio … C’est là le noeud du problème, les cahiers des charges sont très peu transparents pour certains labels.

      Pour en savoir plus sur ce label : https://www.oolution.com/bloog/blog/2014/04/30/comparatif-labels-bio-en-cosmetiques/

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  3. Little No dit :

    Merci pour cet article !
    Ça a du te prendre du temps et lutter contre ce qu’on nous a inculqué depuis des années.
    Même en « bio », il y a du greenwashing malheureusement :(. Quand je dis bio, c’est genre dans les boutiques bio. Parfois c’est fou toutes les marques sans label (surtout dans le textile), on devrait les croire sur paroles 😂

    À bientôt,
    Little No 🍍
    http://touchesdenvie.wordpress.com

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